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Bible, Histoire, Archéologie

Bible,
Histoire,
Archéologie

Introduction

Le 9 avril 2014, la maison Doyle de New York, considérée comme l’un des principaux commissaires-priseurs et évaluateurs d’art et d’objets d’art au monde, a mis aux enchères un cylindre cunéiforme babylonien de Nabuchodonosor II (le Nébucadnetsar de la Bible). La vente de ce cylindre, rare et important, a établi un nouveau record mondial d’enchères pour un cylindre babylonien.
Le prix fixé au départ pour cet artefact a été de 500 000 $, mais il a finalement été adjugé à un soumissionnaire anonyme pour un montant de 605 000 $.
Ce cylindre avait été mis au jour en 1879 sur le site de la Babylone antique par une équipe d’archéologues du British Museum de Londres.

Image ci-contre : le cylindre d’argile, avec un détail du texte, d’une taille de 20,8 cm, décrit la reconstruction du temple de Shamash à Sippar (aujourd’hui Tell Abu Habbah, en Irak) par Nabuchodonosor II et remonte à la période néo-babylonienne, vers 604-562 avant J.-C.

Pour visualiser le cylindre de Nabuchodonosor II, cliquez sur l’image.

Nabuchodonosor II

Nabuchodonosor II (Nabu-kudurri-usur) apparait dans l’Histoire comme le plus important des derniers rois de Babylonie, qui régna de 604 à 562 avant J.-C. Il était le deuxième de la onzième dynastie de dirigeants babyloniens (la dynastie appelée néo-babylonienne ou chaldéenne), qui a duré jusqu’à la prise de Babylone par le roi perse Cyrus II le Grand. Nabuchodonosor II était le fils aîné et successeur du roi chaldéen Nabopolassar (Nabu-apla-usur), fondateur de la dynastie. Nabopolassar avait pris le contrôle de la Babylonie du roi Sinsharishkun d’Assyrie, dans le processus d’expulsion des armées assyriennes de Babylonie, en 616 avant J.-C. En s’associant avec Cyaxare, roi des Mèdes, il ravage de fond en comble Ninive en 612 avant J.-C. qui disparaitra de la mémoire des hommes, selon les prophéties des livres de Nahum et Sophonie qui décrivent sa destruction (Nahum 3,1-19; Sophonie 2 et 3, 1-7).

Image ci-contre : un cartouche sur une jarre comportant le nom de Néco (ou Nékao II). Il fait avec succès la guerre contre Josias, roi de Juda, qui sera tué à la bataille de Megiddo en -609 avant J.-C. Trois mois plus tard, il fait prisonnier Joachaz, fils de Josias et son successeur à la tête de Juda, qui mourra en Égypte, puis impose un tribut au royaume de Juda. Enfin, il établit Jojaqim, le fils aîné de Josias, comme nouveau roi de Juda. Cet épisode est évoqué dans la Bible, plus précisément dans le Deuxième Livre des Rois, chapitre 23, versets 30 à 35. © Gift of Jerome F. Snyder.

Nabuchodonosor a, lui-même, vaincu une armée égyptienne (sous le pharaon Néco II) à Karkemish dans une bataille qui a consolidé son contrôle sur la région et a sévèrement réduit la puissance de l’Égypte qui est tombée sous l’emprise du souverain néo-babylonien. Il fut un bâtisseur d’empire qui a mené des campagnes réussies contre la plupart des États voisins, y compris la Phénicie, la Philistie, Juda, Ammon, Moab et d’autres, et ce faisant, a acquis une richesse et un pouvoir considérables.

une fresque représentant une chasse au lion à Ninive dans le palais du roi assyrien Assourbanipal. © Théo Truschel.

Les cylindres et leur fonction

Il était d’usage pour les rois de Babylone de cimenter leur relation avec les dieux par l’acte de restaurer leurs temples. Ces réalisations ont ensuite été enregistrées en cunéiforme sur des cylindres d’argile (préparés par un scribe de la cour) qui ont ensuite été enterrés dans les fondations des temples restaurés. Les cylindres étaient des commémorations durables de la fidélité du roi aux dieux.

Image ci-contre : le cylindre de Cyrus II dans lequel le souverain déclare l’autorisation de retour de tous les exilés de Babylone. © Théo Truschel.

Cet acte très public a également contribué à créer une apparence de légitimité pour le dirigeant avec ses sujets et ses vassaux. À titre d’exemple, le cylindre de Cyrus (en 539 avant J.-C., un édit pour le retour de tous les exilés de Babylone), l’un des plus grands exemples existants, vante Cyrus en tant que bienfaiteur. Il est à noter que ce dernier avait accédé au trône en déposant le roi babylonien Nabonide, et il croyait apparemment que ce rituel et d’autres rituels similaires légitimeraient sa position avec les dieux et ses sujets.

La destruction du Premier Temple

À la fois dans les Écritures et les Chroniques babyloniennes, il est rapporté que Nabuchodonosor a assiégé Jérusalem (vers 589 avant J.-C.). Sédécias, qui avait été nommé roi tributaire de Juda par Nabuchodonosor II, s’était révolté et avait conclu une alliance avec l’Égypte, en la personne du pharaon Hophra (appelé Vaphrès par Manéthon, Apriès par Hérodote). Le siège a été particulièrement violent (2 Rois 25, 3-8). Lorsque Nabuchodonosor envahit finalement la ville en 587 avant J.-C., les fils de Sédécias furent mis à mort devant leur père, qui eut alors les yeux crevés, et emmené en captivité enchaîné jusqu’à sa mort.

Image ci-contre : une proposition en 3d du Temple de Salomon dans sa version avec le vestibule couvert. © Théo Truschel.
Image ci-contre : le pharaon Hophra (ou Apriès). En 588 avant J.-C., Hophra reprend la lutte contre Nabuchodonosor II qui s’était emparé de Jérusalem (troisième déportation des juifs à Babylone). Il s’empare de Gaza et soutient Tyr et Sidon dans leur résistance aux Babyloniens. Domaine public.

Le point culminant de la campagne fut la destruction de la ville et du Temple ; la ville a été pillée, et le reste de la population emmenée en exil. Jérusalem a été complètement rasée par Nebu-zar-adan, le capitaine des gardes du corps de Nébucadnetsar. Le Temple de Salomon a été détruit et la région a été dépeuplée à l’exception de quelques vignerons et cultivateurs (Jérémie 52,14-16),
«… Il brûla la maison de l’Eternel, la maison du roi, et toutes les maisons de Jérusalem ; il livra au feu toutes les maisons de quelque importance. Toute l’armée des Chaldéens, qui était avec le chef des gardes, démolit toutes les murailles formant l’enceinte de Jérusalem. Nebu-zar-adan, chef des gardes, emmena captifs une partie des plus pauvres du peuple, ceux du peuple qui étaient demeurés dans la ville, ceux qui s’étaient rendus au roi de Babylone, et le reste de la multitude… ».
C’est à ce moment-là des Saintes Écritures que l’arche d’Alliance du Temple de Jérusalem disparait de l’Histoire.

« Eunuque en chef » de l’armée néobabylonienne

La traduction récente d’une tablette cunéiforme, mise au jour dans les années 1870 dans l’ancienne ville de Sippar révèle le nom de Nebo Sarsekim (nom biblique). Il aurait été présent lors du siège de Jérusalem en 586/587 avant notre ère avec Nabuchodonosor II. Nebo Sarsekim est mentionné dans Jérémie 39,3 comme « eunuque en chef » (rab ša-rēši). La traduction du texte cunéiforme confirme sa fonction exacte et nous donne le nom et le titre complet de Nabu-Sharrussu-Ukin. Fait rare dans ce type de document, la date précise, la dixième année du règne de Nabuchodonosor II, soit 8 ans environ avant les événements rapportés par le livre de Jérémie, est mentionnée sur la tablette. © D.R.

Pour visualiser la tablette découverte à Sippar, cliquez sur l’image.

Le Nabuchodonosor biblique

Le rêve de Nabuchodonosor et Daniel

Une grande partie du livre de Daniel décrit les expériences de ce prophète à la cour de Nébucadnetsar. Le roi était troublé par des rêves ou des visions, et exigea que les sages de sa cour lui disent à la fois ce qu’il avait rêvé et son interprétation. Daniel, alors en exil à la cour du roi, était le seul homme qui (par une intervention divine) pouvait dire à Nébucadnetsar quel était son rêve et en expliquer la signification.
En conséquence, Nabuchodonosor lui prodigua des cadeaux, le plaça au-dessus de tous les autres sages, et le nomma dirigeant de la province de Babylone.

Les deux songes détaillés de Nabuchodonosor II
Dans le chapitre 2 de Daniel, Nabuchodonosor II voit en songe une immense statue composée de différents métaux et d’argile. Ces matériaux ont une valeur décroissante de la tête vers les pieds. C’est Daniel qui va révéler au roi le cours de l’histoire qui s’étend sur une période de 25 siècles :

Babylone, c’est la tête d’or : une autorité absolue caractérise ce régime où le roi est une personne sacrée ; l’Écriture l’assimile à une tyrannie (Ésaïe 14,4).
– L’autorité des Mèdes et des Perses sera moindre, passant de la dictature d’un seul homme à un système oligarchique, un gouvernement de familles. La loi écrite l’emportera même sur la volonté d’un roi (Daniel 6,8-9).
– L’empire gréco-macédonien, la troisième puissance politique, correspond aux cuisses d’airain de la statue ; il s’agit d’un régime militaire.
– Puis l’Empire romain, le quatrième, connaît un système impérial et dictatorial. Cette étape de l’histoire correspond aux jambes de fer de la statue ; il est question ensuite des pieds en partie de fer et en partie d’argile. C’est un curieux alliage dont l’aboutissement sera l’effritement et l’éclatement par une pierre (verset 34). Il faudra le chapitre 7 pour saisir la signification de ces dix orteils qui correspondraient à dix nations.

Dans le chapitre 7, les quatre grands animaux représenteraient quatre rois, soit les quatre royaumes ou empires de l’Antiquité :

– Le lion aux ailes d’aigles symbolise Babylone : les archéologues ont retrouvé cet emblème sur les portes de la ville.
– L’ours engloutissant trois côtes évoque l’empire des Mèdes et des Perses, dont les conquêtes militaires furent dirigées vers le Midi, vers l’Occident et vers le septentrion (Babylone, l’Égypte et l’Asie Mineure).
– Le léopard à quatre ailes et quatre têtes préfigure les foudroyantes conquêtes d’Alexandre le Grand, et le rôle de ses quatre généraux qui se partagèrent son Empire après la mort soudaine d’Alexandre en 323 avant J.-C.
– Quant au quatrième animal, il est plus terrible encore que les précédents ; les rigueurs du joug de Rome sont évoquées par ses dents de fer, en parallèle avec les jambes de fer de la statue. Autre correspondance entre Daniel 2 et 7 à laquelle nous avons déjà fait allusion, les dix orteils de la statue et les dix cornes du monstre (Daniel 12,42 ; 7,7).

La porte d’Ishtar

L’enceinte de la cité intérieure est percée de huit portes (George 1992:15) qui sont inventoriées dans la cinquième tablette de Tintir = Babylone lignes 49-56. Un nom de «cérémonie» est attribué à chacune de ces portes et garantit à la ville la protection divine. De chacune des portes partent les voies processionnelles des divinités les plus importantes.
L’un des monuments les plus caractéristiques subsistant de Babylone est l’une de ces huit grandes portes d’accès, située au nord de la cité : la porte d’Ishtar.
Il s’agit d’une imposante structure, en briques décorées de rangées de figurations des animaux emblématiques des divinités. Placés comme des sentinelles, ils sont censés intimider et refouler les esprits maléfiques et protéger la cité et ses habitants.

Image ci-contre : une vue artistique de la porte d’Ishtar (en arrière-plan) et de la Voie Processionnelle. © akg images/Balage/Balogh/archaeologyillustrated.com

Cette porte, érigée vers 575 avant J.-C., est dédiée à la déesse éponyme Ishtar, déesse de l’amour physique et de la guerre. Elle apparait comme le symbole même de Babylone. Son nom de «cérémonie» est Ishtar Sakipat Tebisha ou «Ishtar est victorieuse de ses ennemis». La porte d’Ishtar est bâtie sur le principe de la double porte, c’est-à-dire prise entre un mur extérieur et un mur intérieur. Bien que les fouilles n’aient pas permis de retrouver les vantaux des portes, des textes anciens, comme la tablette de commémoration, les décrivent comme étant réalisés en bois de cèdre avec des bandeaux de bronze.
– La première porte (extérieure) fait environ 48 m. de long sur 15 à 18 m de haut, flanquée de deux tours de part et d’autre du passage. C’est celle exposée au Pergamon Museum de Berlin.
– La deuxième porte (intérieure) est la plus grande. Elle est insérée dans le rempart intérieur et dotée elle aussi de deux tours. Entre les deux tours se trouve une cour ouverte. Les contraintes de la structure du Pergamon Museum n’ont pas permis de reconstituer cette deuxième porte.

Image ci-contre :  une maquette de la porte d’Ishtar et de la Voie Processionnelle longue de 250 m  et large de 20 à 24 m. © Pergamon Museum de Berlin.

Les archéologues estiment qu’il y eu différentes phases de constructions qui ont chaque fois modifié son décor:
– La première phase est caractérisée par un décor émaillé et la dernière phase par des bas reliefs en brique émaillée et colorée. Sur les murs des portes, on trouve des rangées de taureaux et de «dragons-serpents» (mushkushu). Le taureau symbolise le dieu Adad (dieu de l’Orage ou du Temps). Le lion, symbole d’Ishtar, n’est pas présent sur les murs de cette entrée. À proximité de la porte on peut également noter la présence d’une inscription (partiellement restaurée) de Nabuchodonosor rapportant les détails de sa construction (extrait) :
«… j’ai (Nabuchodonosor) jeté les bases de la porte vers le niveau des eaux souterraines et les ai construites en pierre bleue…sur les murs de la chambre intérieure de la porte se trouvent des taureaux et des dragons, que j’ai magnifiquement ornés avec un éclat de luxe pour tous les hommes…dans la crainte…»
Les entrées de la cité intérieure témoignent de cette recherche du grandiose qui trouve une magnifique expression dans la porte monumentale d’Ishtar.

Deux des 120 lions (symboles d’Ishtar) représentés le long de la Voie Processionnelle. © Théo Truschel.

La porte d’Ishtar et le mushkushu

Sur les murs de la porte d’Ishtar est reproduit, en alternance avec le taureau, un étrange animal. Cet animal fantastique, l’archéologue R. Koldewey l’identifie à un sirrush (dragon, mot dérivé de l’akkadien, le mot mushkushu en est la transcription moderne). Il le décrit de la manière suivante :
«… un corps mince recouvert d’écailles, une longue et mince queue recouverte d’écailles et un long cou recouvert d’écailles surmonté d’une tête de serpent. De la bouche sort une longue langue fourchue…».

Image ci-contre : une fresque du mushkushu sur le mur de la voie processionnelle. © Théo Truschel.

Ce « dragon-serpent » représente une créature hybride, dotée d’une queue et d’un corps de serpent avec les pattes arrière en serres d’aigle ou de griffes, les pattes avant sont semblables à celles d’un lion. La tête de serpent du dragon (mushkushu) est une représentation du dieu Mardouk.
Certains historiens établissent un lien avec l’animal mystérieux mentionné dans le livre de Bel et le Dragon (livre apocryphe de la Bible). Cet ouvrage nous rapporte que le temple babylonien de Bel (autre nom pour désigner Mardouk) est gardé par un «dragon». Nabuchodonosor propose au prophète hébreu de Yahvé, Daniel, d’être confronté à cette «divinité» qu’il tue finalement.

Image ci-contre : la porte d’Ishtar. © Théo Truschel.

D’autres historiens estiment aussi que la Bible se réfère au mushkushu dans le chapitre 40 aux versets 15-19 du livre de Job. L’animal traduit dans certaines versions bibliques comme un hippopotame serait plutôt un mushkushu :
«Voici [l’hippopotame], à qui j’ai donné la vie comme à toi ! Il mange de l’herbe comme le bœuf.
Le voici ! Sa force est dans ses reins, et sa vigueur dans les muscles de son ventre ; il plie sa queue aussi ferme qu’un cèdre ; Les nerfs de ses cuisses sont entrelacés ; ses os sont des tubes d’airain, ses membres sont comme des barres de fer…dans le cadre du lotus, il se trouve caché dans les roseaux du marais…»
Certains cryptozoologistes (ils étudient des animaux dont l’existence est sujette à caution) comme Roy P. Mackal, Willy Ley, Bernard Heuvelmans, proposent encore une autre théorie : le mushkushu serait un animal entraperçu ou capturé dans l’Antiquité par des Néobabyloniens sur les rives du fleuve Congo en Afrique équatorial. Le mokélé-mbembé (littéralement Celui qui peut arrêter le flot de la rivière) est le nom local donné aujourd’hui à cet animal se rapprochant étonnamment d’un dinosaure sauropode de 13 mètres environ. Sa présence est signalée à maintes reprises par les habitants des lacs et des marais proche de la Likouala et notamment dans le lac Télé (République du Congo). Selon les indigènes, il se nourrit principalement des fruits d’une plante locale, le Malombo. Il serait donc herbivore, mais certains témoins affirment qu’il tue aussi des hommes et des hippopotames probablement pour défendre son territoire. Son existence actuelle n’est pas avérée, malgré plusieurs expéditions toutes récentes (entre 1902 et 2002), divers témoignages recueillis sur place et un dessin relativement précis tracé par plusieurs témoins.
Toutefois on estime aujourd’hui que la représentation du mushkushu sur les murs de la porte d’Ishtar serait plutôt symbolique. Cet animal fantastique apparait comme une synthèse de différentes divinités dans la mythologie très complexe de l’histoire de la Mésopotamie.

Une maquette reconstituant la Voie processionnelle exposée au Pergamon Museum de Berlin. © Pergamon Museum de Berlin.

La porte d’Ishtar et la Voie processionnelle

La Voie Processionnelle emprunte la porte d’Ishtar. On peut suivre son tracé sur une longueur de 800 mètres environ. C’est le long de cette rue que l’on porte en procession les effigies des dieux au cours de la Fête du Nouvel An. Cette Voie est désignée sous le nom Aj-ibur-shapû, ce qui est traduit de différentes façons : «l’ennemi invisible ne devrait pas exister» (Marzahn 1994b:14), «Que les arrogants ne prospèrent pas» (George 1992 :67l.64), «Que l’adversaire obstiné ne reste pas en bonne santé» (GAD) S/l 492).

Image ci-contre : la Voie processionnelle partiellement reconstituée au Pergamon Museum de Berlin. © Théo Truschel.

Cet accès monumental à la cité intérieure a été construit en trois étapes par Nabuchodonosor. Les fouilles ont permis de dégager différents niveaux de chaussées et divers portails et tours, ainsi que des briques émaillées ou non, décorées de dragons et de taureaux. Dans la troisième et dernière étape de la construction, l’accès à la ville se fait par une magnifique avenue de 250 mètres de long, flanquée de murs de sept mètres d’épaisseur, avec trois séries de bastions. Ces murs, surmontés de créneaux semblables à ceux que l’on peut voir sur des plaques d’or d’un collier exhumé d’une tombe à Babylone, sont coupés par intervalles par des tours construites légèrement en saillie. Ils sont décorés de frises de briques en relief et émaillées de couleurs vives (bleu, jaune, blanc, et rouge), figurant 120 lions, l’emblème d’Ishtar. En s’approchant de la Porte, on atteint une hauteur de 12 à 14 m par rapport au niveau initial du sol en gravissant une rampe de 20 à 24 mètres de large. L’assise de la chaussée est faite d’argile, sable et moellons. Par-dessus cette couche se trouve un sous pavage en briques prises dans de l’asphalte, lequel sert de fondation au dallage en pierre. Les vestiges de la chaussée suggèrent qu’à l’instar de nos rues actuelles la Voie Processionnelle est divisée en une voie centrale réservée à la circulation et, situés de chaque côté, des trottoirs pour les piétons.
La Voie Processionnelle se poursuit au-delà de la Porte d’Ishtar, en suivant le mur oriental du Palais Sud, jusqu’à l’Etemenanki qu’elle contourne vers l’ouest pour enjamber l’Euphrate par un pont. En longeant le Palais, la chaussée redescend pour atteindre le niveau de la ville.
Le parallélisme des allées, la parfaite symétrie de l’organisation architecturale donnent un caractère solennel qui contraste avec les précédentes réalisations assyriennes.

La porte d’Ishtar et l’historique des fouilles archéologiques

Les ruines de l’antique Babylone avaient déjà été visitées à plusieurs reprises à l’époque médiévale, notamment par les voyageurs Benjamin de Tudèle et Petahia de Ratisbonne. Benjamin est le premier à reconnaitre les vestiges de la ziggourat. En 1787, l’abbé de Beauchamp examine plusieurs objets anciens exhumés du site. En 1811, C. J. Rich, le résident britannique de la Est India Company, commence à explorer les ruines de Babylone.

Image ci-contre : Les premières fouilles archéologiques de Babylone. Domaine public.

Non seulement il décrit le site, jusqu’alors mythique, à l’aide de dessins de Bellino de Tübingen dans Narrative of a journey to the Site of Babylone (Récit d’un voyage sur le site de Babylone, Londres 1839), mais il en rapporte quelques inscriptions, des tablettes et des sceaux.

Image ci-contre : la porte d’Ishtar lors de sa découverte. Domaine public.

Il les vend au British Museum et au professeur G. F. Grotefend qui travaille au déchiffrement de l’écriture cunéiforme. Des explorations superficielles sont réalisées par A. H. Layard en 1850 (qui se consacre ensuite aux fouilles du palais de Sennachérib sur le site de Ninive) et par F. Fresnel et J. Oppert en 1852. Ces deux derniers réalisent un premier plan détaillé de la cité. On peut citer W. Budge pour le compte du British Museum en 1887 et des fouilles au caractère très peu scientifique entreprises par H. Rassam au cours des années 1870 et 1880. Au cours des années 1970, un groupe de chercheurs allemands s’est également brièvement intéressé au site de Babylone et une équipe de l’Université de Turin a sondé différents secteurs de la ville au cours des années 1970 et 1980.
D’autres travaux, interrompus par la guerre, ont été entrepris par la Direction des Antiquités irakiennes à partir de 1958, mais il s’agit davantage d’un programme de reconstruction. Une reproduction plus petite de la porte d’Ishtar a été érigée en Irak sous Saddam Hussein pour servir d’entrée à un musée qui n’a jamais été construit. Ce modèle réduit a subi des dommages causés par la guerre.